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  • Adeline

Rencontre avec Chien Noir


Connu avec la musique d’une publicité pour une marque de vêtements, son titre  « Histoire vraie », Jean Grillet, alias Chien Noir, est auteur, compositeur et interprète bordelais. Lauréat des chantiers des Francofolies de La Rochelle en 2020 et du Fair en 2021, il a été nommé aux Victoires de la musique en 2022. 

Touchée par sa sensibilité, sa voix et ses textes délicats, j’ai très vite accroché à son univers. Rencontré une première fois, à son début de carrière, c’est au Vauban, avant son concert que j’ai eu le bonheur d’en savoir un peu plus sur lui, sa musique et ses projets.

Après «Quelle importance », « Lumière bleue », puis son EP « Beaux », nous avons eu le bonheur de savourer son premier album "Apollo" sorti en octobre dernier … 





Bonjour, peux-tu nous parler de l’origine de ton projet « Chien Noir » ?

Il y a évidemment une dimension littéraire dans mon nom de scène, il fait référence au personnage de Chien Noir dans « L’Ile au trésor » de Stevenson. Mais il n’y a pas que ça, il y a aussi Churchill qui parlait de sa dépression comme son chien noir. J’aimais bien cette idée là. 


Ton projet c’est plus ce qu’on peut appeler de la pop mélancolique avec diverses influences. Quel est l’artiste qui t’a donné le plus envie de jouer ? 

C’est une question à laquelle j’ai toujours beaucoup de mal à répondre. (Rires). Il y en a plein en fait mais certains ont plus légitimé ce que je suis, je crois, comme Sufjan Stevens. Il a légitimé le fait d’être tendre et doux. Je me suis dit que je pouvais m’exprimer comme ça si j’en avais envie. Je peux parler de ma famille, si j’en ai envie. Faire des choses très jolies et douces. En fait, en réfléchissant bien, il y a plein de gens, dans les années 80, comme Phil Collins, Toto, Police… 


Des mélodies qui ne sont pas forcément sur la revendication, le côté très rock de certaines figures masculines dans la musique. Toi, tu voulais te définir autrement et être reconnu différemment ?

Je pense qu’il y a une place pour tout le monde, surtout en musique et dans les arts. C’est bien un endroit où on peut s’exprimer comme on veut. 


Voulais-tu, très tôt, faire de la musique étant enfant ?

Je fais de la musique depuis mes 6 ans, grâce à ma mère. Elle s’était mise au piano à ce moment-là, et moi je l’imitais. Elle m’a inscrit en école de musique pour que je puisse la laisser tranquille (rires). Elle a bien fait et m’a aidé à ne jamais lâcher même quand j’en avais un peu marre. Elle a insisté. A 13 ans, je me suis mis à faire de la guitare. 


Qui te faisait rêver ?

Des modèles comme Nirvana, j’avais beaucoup d’admiration pour Kurt Cobain mais aussi Noir Désir. 


Ce qui était plaisant aussi, c’était le fait de pouvoir transporter cette guitare un peu partout ?

Oui, on avait monté un groupe avec trois copains. Personne ne savait jouer et puis on s’est tous débrouillé pour s’acheter une guitare, une basse et une batterie. Les parents ont été mis à contribution. Moi j’avais déjà des chansons, la première a été écrite à ce moment-là, quand mes parents se sont séparés. 


Tu avais besoin d’écrire ? 

Oui, mais je ne me rendais pas compte que j’en parlais. Je crois que cela a toujours été comme ça. Aujourd’hui, je suis plus conscient lorsque j’écris mais ado je ne le comprenais pas et c’était très thérapeutique. 


As-tu de suite voulu laisser une trace, enregistrer comme par exemple Noé Preszow qui nous en parlait il y a quelques temps ?

Non, moi ce n’était que de l’instant présent. Quand tu es ado, à la campagne, sans internet, mes parents n’étaient pas du tout dans la musique, personne de mon entourage d’ailleurs. Je me suis vraiment fait tout seul, en fait.



La magie de l’instant et la scène ? 

Je me souviens, vers l’âge de 16 ans, il y a une salle de musique à Bordeaux « Rock School Barbey »  qui a un bus transformé en studio. Ils venaient dans la campagne selon les besoins, c’est avec eux qu’on a fait notre premier enregistrement. On était un peu les stars du lycée car ils étaient venus ensuite au lycée, on avait gagné des points (Rires).


Par la suite, as-tu fait des études dans ce milieu, quel bagage as-tu ? 

Et bien, pas du tout dans la musique ! J’ai fait Hypokhâgne, mais pas longtemps, puis je suis rentré dans un BTS œnologie car je suis petit-fils de vignerons. C’était un peu facile et logique ! 


Surprenant ! Et pourquoi changer de voie ensuite ?

C’est un monde assez spécial, le vin, je ne m’y suis pas totalement retrouvé. Et puis, j’avais vraiment envie de faire de la musique. Mon père m’avait dit qu’il me fallait un vrai diplôme, ce qui est idiot car on ne doit pas mettre dans la tête d’un ado des choses qu’il n’a pas envie de faire. Je ne le blâme pas mais c’est du temps perdu. Après cela, je suis rentré au conservatoire dans la filière « composition électro-acoustique, musique concrète et musique savante », c’était assez marrant ! 


Tu as fait des rencontres là-bas ?

Bien sûr, j’ai rencontré des gens et des musiciens. Ce qui m’a convaincu de monter un groupe de folk, A Call At Nausicaa. Ça a failli devenir quelque chose mais malheureusement ça n’a pas marché. J’ai appris beaucoup de choses sur les contrats, c’était super intéressant à cette époque. 


Tu avais une structure qui se dessinait dans ta tête, un champ des possibles ?

Oui, on avait été signé dans un petit label et en fait j’ai eu besoin de m’exprimer tout seul. 


Quand est né « Chien Noir »  ?

J’ai écrit mes premières chansons pour ce projet en 2017, c’est assez récent. 


Déjà le titre « Histoire vraie » ?

Ça a mis du temps pour en arriver là, car cette chanson, je l’ai écrite pendant le confinement, en 2020, je crois. 


On s’est connu avec ce titre, puis au festival des Pluies de Juillet… Il y a évidemment eu d’autres dates pour ce début de carrière, non ? 

Oui j’ai fait énormément de dates. En deux ans, j’ai dû faire 70 dates, il y a des gens qui m’ont fait confiance. Je travaille avec un tourneur formidable Caramba, avec Alice Pourcher, des gens humainement formidables. C’est pour ça que je voulais travailler avec eux et qu’on bosse ensemble. L’idée était d’avoir une stratégie plutôt humble. 


C'est -à -dire ?

Un projet met du temps à se développer. Il faut être patient, avoir les pieds sur terre et les choses s’installent petit à petit. On a fait des petites salles, pendant deux ans, mais depuis un an tout est complet, tout le temps. Même des salles entre 100 et 300 places. C’est trop bien ! J’adore cette manière de faire ! 


Un beau travail de Caramba pour te trouver des salles adaptées, au bon format ? 

Tout à fait, je préfère les petites salles et les remplir et être au contact. 


La suite c’est « Beaux », est un des titres assez récent …

Oui, je l’ai sorti il y a moins d’un an. 


Un peu plus de promo, dont Culture Box… Comment as-tu vécu cette médiatisation un peu plus importante ?

C’est assez spécial car je ne suis pas très à l’aise avec mon image, pas très confiant en moi. La première fois que tu fais des télés, du coup, tu dis des conneries. Tu n’arrives pas à te regarder ! (Rires)


Parce que tu as peur ?

Ben, j’ai compris cela il n’y a pas si longtemps que ça. En fait, je crois que ce qui est très important c’est d’être soi-même. D’expliquer très simplement les choses, parce que ce qui est le plus important c’est de dire la vérité. 



Tout à fait ! 

Au début, je ne disais pas que j’étais un fils de paysan. A un moment, je me suis demandé pourquoi je ne le disais pas, c’est là d’où je viens, c’est ce qu’il faut que je dise aux gens. Au final, quand tu veux cacher les choses ou les détourner, c’est là que tu dis des choses inintéressantes, fausses.


La suite sera donc à ton image ?

Oui, avec l’album que je viens d’écrire, je vais encore plus dans ce sens là. Je suis encore plus sincère.


Cest raccord avec ce que tu racontes et vis sur scène aussi ? Je suis pas sûre que ce soit les histoires des autres …

Absolument, ce ne sont que mes histoires, que j’écris. Même si j’ai essayé de voir l’écriture différemment pour l’album. A un moment, si tu parles que des histoires qui te sont proches ou vécues, il ne t’arrive pas que des choses extraordinaires, tous les jours. J’ai dû chercher d’autres axes d’écriture et c’était hyper intéressant comme chemin. 


Tu ne voulais pas tomber dans le banal, aller chercher de l’émotion pour ensuite le chanter, le porter, le faire vibrer ?

Oui, tout à fait. A chaque fois, cela fait écho à qui je suis. Par exemple, sur le prochain album, il y a deux chansons sur l’amitié. Je trouve que je suis un ami qui n’est pas facile. J’ai écris une chanson là dessus, où je dis qu’il est difficile d’être un bon ami. 


Le propos de l’album, est-ce une carte d’identité temporelle ou non ? Devons-nous nous attendre à des prises de risques en terme de son ?

En effet, en terme de son, j’ai fait quelques gros choix. Par rapport à ce que je te dis, à un moment, je me suis demandé qui j’étais, après « Beau ». Je suis né dans les années 80, cette musique des années 80-90 a fait de moi ce que je suis maintenant artistiquement.


Et concrètement ? 

Au niveau des sons, esthétiquement, il y a des choix très forts qui ont été faits et très différents de ce que je fais normalement. Je me suis amusé à faire ça, c’était dingue ! 


Peux-tu nous en dire plus ? Un style un peu US, une pop déstructurée ?

Exactement ! Dedans, il y a du Phil Collins. Derrière tout ça, la réalisation que j’ai faite est recherchée. Il y a un artiste que j’aime énormément : Bon Iver et ma manageuse est une fan absolue de Jean-Jacques Goldman, elle me dit souvent que les titres que je sors lui font penser à ses titres. A un moment, j’ai donc écouté Jean-Jacques Goldman, puis, je me suis dis que lui et Bon Iver faisaient la même chose. Et là, un truc s’est ouvert dans ma tête. 


C'est-à-dire ?

A l’époque, Jean-Jacques Goldman était référencé US, années 80 avec Bruce Springsteen, Phil Collins. Ça a ouvert énormément de choses dans ma musique.


Sur ton EP, tu avais collaboré avec HollySiz, aka Cécile Cassel, aurons-nous la chance d’avoir aussi un duo sur l’album ?

Oui, il y a un duo avec Clou.


Sur ta dynamique d’écriture, est-il toujours facile de chanter tes chansons empreintes d’émotion, d’intime en live, devant les gens ?

J’ai réalisé que quand tu portes cela à un public, tout d’un coup ces spectateurs font le travail pour toi. Tu es juste le vecteur d’un message que tu as voulu dire, le public le prend pour lui. Il faut dédramatiser la scène, l’énergie sur scène est toujours différente, d’un jour à l’autre. J’essaie de ne jamais me dire qu’il y a des bons et des mauvais concerts, il y a juste des énergies différentes. D’autant plus que je suis accompagné par un gars formidable, Alexandre Perroud, je peux me reposer sur lui, il m’apporte énormément sur scène. 



Il joue avec toi sur scène ?

Tout à fait. Je ne suis pas seul en scène. Il est au synthé, machines et percussions et piano. 


Tu peux donc avoir plus de liberté, passer du piano à la guitare… ? 

Exactement, je suis vraiment plus proche des gens, j’adore faire ça. J’ai découvert ça grâce à lui. 


Donc tu as aussi gagné une liberté corporelle, une autre chose à gérer pour toi ?

Carrément, tu gagnes énormément car le piano et la guitare te bloquent vachement. Tout d’un coup, avoir juste le micro à la main et ton corps est libre. Il n’y a rien devant, ça change tout ! Le plus dur c’est être capable de s’exprimer sans en faire des caisses. 


Pas simple ?

Non, la première chose que tu fais sans instrument, c’est trop et c’est parce que tu veux meubler. (Rires) Alors qu’en fait, tu peux très bien rester immobile ! Et en ce moment, c’est ce que j’apprends.


Une chanson « Je veux, je veux, je veux » est sorti en juin 2023 … Parle-nous de lui !

Et bien, c’est le premier single de mon album. C’est un titre plus pêchu, j’ai envie d’être écouté. 


Plus radiophonique pour le coup ?

Oui, c’est ça. 


Une certaine forme de lâcher prise, sans armure ?

Oui, tu as totalement compris. A un moment, il faut y aller ! Cet album, c’est l’envie de quelqu’un d’y aller le plus fort possible, à fond !


Le jeu de mots serait-il que tu as quitté la laisse ? (Rires)

Oui, il y a un peu de ça. (Rires) Et maintenant, j’enlève ma casquette, je joue sans sur scène. Ça va aller de plus en plus vers « Je suis, qui je suis ». 


Un jour aurons-nous ton prénom et plus le pseudo « Chien Noir » ?

Euh je ne crois pas encore. Je pense que le pseudo, c’est bien, ça me correspond !


Merci beaucoup !

Merci à toi !


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